Depuis le temps qu’on les attend, les voici enfin ces fameux « expendables », littéralement, ceux dont on peut se passer. Malheureusement, on en a perdu quelques-uns en route, comme Wesley Snipes (en prison), Steven Seagal (bisbille avec le producteur), et surtout Jean-Claude Van Damme (pas assez de présence à l’écran pour son rôle comparé à son standing, selon lui). D’autres exemples ici.
Malgré cette petite déception, The Expendables reste le must-see de la semaine, ne serait-ce que pour la présence de Sylvester Stallone, des deux côtés de la caméra. N’ayant vu qu’un seul de ses films comme acteur (Demolition Man, dont je garde un bon souvenir), je n’ai pas hésité une seconde et me suis rendu avec enthousiasme dans le cinéma le plus proche pour enfin, savoir.
Et dès le générique, j’ai compris de quoi il retournait : typo grasse et carrée en texture « acier inoxydable », musique badaboumesque, puis arrivée de grosses motos pétaradantes, tout sela sent la couille à plein nez, et assez fort. Car oui The Expendables est un film de mecs, de vrais.
Chez Stallone les femmes n’ont leur place que comme prétexte à l’action. A ma gauche nous avons la fille du dictateur mexicain (ou apparenté) de service (joué par le Angel Batista de Dexter), qui est gentille, elle, pas comme son affreux papa, et qui veut juste le bien de son peuple, ce qui émeut assez le personnage de Stallone. A ma droite, la girlfriend de Christmas (Jason Statham), battue par son nouveau keum, nous vaudra une bagarre vengeresse, seul contre toute une équipe comme au temps du Transporteur, désignant tout net Statham comme une sorte de Clint Eastwood des temps modernes, et conclue par un superbe « La prochaine fois ce sera tes couilles » – je ne dévoile pas l’objet que Jason vient de poignarder rageusement à ce moment précis (indice : l’action se déroule sur un terrain de basket).
Voilà pour ce qui est des gonzesses. Du côté des gars, tout est bien cadenassé également, chacun a sa propre fonction dans le film et s’en acquitte à merveille. Stallone en chef de bande est crédible, sa rivalité connivente avec Statham est plutôt savoureuse, et leurs registres différents les rend complémentaires. Jet Li et sa petite taille apportent la touche running-gag adéquate, Dolph Lundgren hérite du rôle de traître, tandis que Mickey Rourke s’adonne à la philosophie, passant tout le film à donner des leçons de vieux sage, faire des tatouages à ses potes et peindre des fleurs sur une guitare en pleurnichant. Pour ce qui est de Bruce Willis, on le voit à peine cinq minutes, partagées avec un autre guest de choc pour une scène plutôt rigolote (mais pas plus). Les autres on s’en fout, on sait pas qui c’est.
A part ça, disons-le, l’intrigue de The Expendables est assez nulle, une vague histoire d’ex-agent de la CIA cupide et impitoyable qu’il faut éliminer. Mais peu importe car le vrai film réside dans ses scènes d’action, évidemment. Et à ce petit jeu, Stallone est assez bon. Sa mise en scène est impeccable, parfois audacieuse, se laissant aller par moments à de chaleureux élans gores, du plus bel effet. Dans son domaine, Stallone maîtrise finalement aussi bien son sujet que des spécialistes comme John Woo ou Paul Greengrass.
Pour ce qui est des dialogues par contre, c’est la grosse faiblesse du film, et il faut tout le talent de Mickey Rourke pour empêcher une scène de conversation mélodramatique de friser le grotesque. Heureusement, ce genre d’effusions se font rares et sont oubliées dix minutes plus tard après une bonne grosse tuerie. Cependant, un deuxième reproche que l’on pourrait faire à Stallone est l’invincibilité totale de ses protagonistes. Là où il aurait eu l’occasion de suggérer une certaine fragilité de ses héros laissés pour compte, il préfère en faire des machines à tuer invulnérables. Jamais touchés, jamais en danger, jamais morts.
En tout cas, on ressort plutôt réjoui de ce film de pur divertissement, pas déplaisant pour qui n’en attend que de belles fusillades et des dialogues bien connauds mais parfois rigolos.