Des chansons qui se ressemblent

En cette soirée de dépression footballistique, je m’autorise à poster un billet totalement freestyle, n’ayant aucun rapport avec l’actu ni aucune espèce d’intérêt. C’est juste pour partager cette illumination que j’ai eu récemment au cours de mes pérégrinations musicales sur Spotify. En effet il semblerait qu’en 1996, Chris Isaak ait pompé l’intro de La Grange de ZZ Top, qui avait déjà pompé en 1973 l’intro de Spirit in the sky de Norman Greenbaum (1969), qui était déjà très inspirée de On the Road Again de Canned Heat (1968). J’ai pas raison ?

NB : pour Chris Isaak je suis désolé, j’ai pas trouvé d’extrait de qualité plus pourrie.

When you’re strange : instructif mais plan plan

Les sorties cinéma en ce moment, c’est pas la joie. Entre le film de chien-chien trop mignon (Hatchi), la série B au pitch pas très frais (The Crazies) et la comédie qu’on n’attendait pas avec Marc Lavoine (Les meilleurs amis du monde), il ne nous reste qu’un bon vieux docu rock pour pleurer.

When you’re strange parle des Doors, et c’est Johnny Depp qui raconte. Voilà pour le point de départ. Le premier piège est déjà évité : j’avoue que je n’ai pas vu le film d’Oliver Stone (The Doors), cependant j’ai un mauvais a priori sur les biographies romancées au cinéma et encore plus si cela concerne un de mes groupes favoris. J’aurais donc mal apprécié qu’un acteur hype du moment perde vingt kilos pour biopiquiser Jim Morrison, fut-ce sous la direction de Gus Van Sant.

Alors oui, d’accord pour un documentaire. Celui-là est très bien, on apprend des trucs, déjà. La chronologie de l’histoire du groupe est retracée dans le détail, les images d’archives (qui constituent la totalité du film) sont plaisantes, parfois inédites. La musique est parfaite (de fait). Le problème avec Tom DiCillo, c’est que son film reste toujours très factuel. Les extraits de Highway (moyen-métrage mystique de Jim Morrison tourné en 1969 et jamais monté) disséminés par-ci par-là ou la narration flegmatique de Johnny Depp ne suffisent pas à donner une vraie âme au récit. C’est pourtant la moindre des choses quand on s’aventure sur un tel terrain (les Doors quoi !).

Un passage sympa du film

Faute d’archives disponibles, on peut encore pardonner le peu de temps accordé au début du film à l’adolescence de son héros (pourtant cruciale à mon avis pour comprendre la suite de l’histoire). Les divers dérapages et pétages de câbles de Jim Morrison en revanche sont décrits dans le moindre détail, images à l’appui (« alors je vais vous montrer ma bite ! »). Par contre on ne s’intéresse que poliment aux autres membres du groupes, pour mentionner par exemple que Robby Krieger (guitariste) kiffait le flamenco ou que les lignes de basses étaient jouées au clavier, mais quasiment jamais leurs rapports au sein du groupe ne sont évoqués si ce n’est à la fin du film pour justifier leurs divergences d’avec leur leader.

La profondeur du personnage de Jim Morrison est juste suggérée par bribes, extirpée de rares images d’interviews (qui représentent environ cinq minutes sur 1h30 de film) ou lorsqu’on nous parle très rapidement des travaux littéraires du chanteur (il était notamment très fier de la publication de ses recueils de poésie). Au final on regrette que toute l’attention du réalisateur soit portée sur les côtés trash du groupe et moins sur l’analyse de la naissance du mythe ou même de la musique elle-même, très brièvement évoquée en tout début de film.

Tom DiCillo s’essaie parfois à donner un point de vue à son film, mais tape souvent à côté de la plaque. Toujours très schématique dans son montage d’images et de musique, il se prend parfois à extrapoler les paroles des morceaux du groupe pour y voir des critiques de la guerre, de la violence, etc. Et se perd en considérations pour le moins simplistes qui nous valent notamment une séquence balourde à souhait superposant le chef d’oeuvre Riders on the storm à des images de guerre du Vietnam. C’est dans ces moments qu’on se rend le plus compte du peu de matière dont a disposé DiCillo pour faire son film. Quand on n’a pas d’image, il faut meubler. Voilà.

Malgré son côté Un jour un destin amélioré, When you’re strange reste un documentaire instructif et profitable, qui a au moins le mérite de donner une furieuse envie de se replonger dans l’oeuvre immense des Doors. Ce que je m’en vais faire de ce pas.

Top 10 des BO géniales de Goblin

Il y a un an et un jour, par une mauvaise coincidence de calendrier, je ratais le passage de Goblin à La Villette Sonique, groupe italien culte des années 70, très avare de prestations scéniques, et finalement assez peu connu du grand public. Ne doutant pas une seule seconde qu’il visite régulièrement ce blog (le grand public), je me dévoue pour réparer cette injustice et dévoiler au monde entier l’oeuvre géniale de ce groupe mythique.

Mais d’abord un peu d’histoire.

En 1972, en Italie, quatre jeunes zicos du nom de Claudio Simonetti (claviers), Massimo Morante (guitare), Fabio Pignatelli (basse) et Walter Martino (batterie) se trouvent une passion commune pour Genesis, King Crimson, Gentle Giant ou Emerson Lake and Palmer. Ils composent quelques morceaux et les transmettent à Eddie Odford, producteur de Yes, qui tombe sous leur charme et propose au groupe de s’installer à Londres. Le groupe, rejoint par un chanteur anglais Clive Haynes, remplace son batteur et se forme sous le nom de Oliver. C’est un fiasco, Oliver ne trouve pas son public et rentre en Italie, laissant sur l’île Clive Haynes et le remplaçant par Tony Tartarini. Le groupe est recruté par l’excellent label Cinevox sous le nouveau nom Cherry Five et commence à participer à quelques bandes originales de films du coin. Je signale au passage la richesse de la production soundtrackesque italienne de l’époque, à laquelle je consacrerai prochainement un nouveau top.

Le réalisateur Dario Argento aime le travail de Cherry Five et leur propose en 1975 de venir travailler sur son nouveau film Profondo Rosso. L’histoire commence. Emotion.

1. Profondo Rosso (Les Frissons de l’angoisse, Dario Argento) – 1975
La première vraie BO du groupe, qui en profite pour trouver son nom définitif (Goblin), est un chef d’oeuvre. L’album de la bande originale du film se vend d’ailleurs à un million d’exemplaires et reste 12 semaines consécutives en haut des charts. Goblin s’inspire d’abord des tauliers de l’époque en matière de BO (Morricone, Trovajoli, Bacalov, Umiliani, Cipriani, etc) et en tire le meilleur, pour en sortir des modèles du genre tels que ce Death Dies efficace ou ce Mad Puppet poseur d’ambiance :

Death dies

Mad puppet

Mais leur morceau de bravoure reste la musique d’ouverture du film. Une ligne de basse ravageuse, une mélodie éclatante à l’orgue et ce twist de mi-parcours souligné par une comptine oppressante font de ce générique un vrai petit court métrage. Mais un petit extrait vaut mieux qu’un long discours.

2. Suspiria (Dario Argento) – 1977
Argento, satisfait de leur prestation sur Profondo Rosso, fait de nouveau appel à Goblin pour son Suspiria, deux ans plus tard. Le film, n’étant pas un giallo tout à fait habituel, nécessite une bande originale singulière. Pas besoin d’en dire plus à Claudio et ses potes, qui ressortent de leur placard un vieux bouzouki chiné au fin fond de la Grèce, percussionnent au tabla indien une mélodie jouée au clavier célesta. Le tout, surélevé par des boucles synthétiques phasées et des murmures d’outre-tombe, finit de donner au film, déjà très réussi, toute sa dimension inquiétante et surréaliste.

Suspiria

Sighs

Death Waltz (car Goblin sait aussi faire du Nino Rota)

3. Buio Omega (Blue Holocaust, Joe D’Amato) – 1979
Une sympathique série B italienne à base de taxidermie humaine, l’occasion pour Goblin de renouer avec ses premières influences, Yes, Genesis ou ELP pour une BO à la fois disco et psychédélique.

Buio Omega

4. Zombi (Zombie, Georges A. Romero) – 1978
Après le succès de Profondo Rosso, Goblin est régulièrement sollicité pour recomposer les bandes originales de films américains pour les distributeurs italiens, c’est notamment le cas du film Martin de Georges Romero (cf no. 9). Impressionné par la qualité des morceaux de cette BO alternative, Romero fait appel à Goblin pour sa suite de La nuit des morts-vivants. Une bien belle idée.

Zombi

Zaratazom (car Goblin sait aussi faire du hard rock)

5. Tenebre (Ténèbres, Dario Argento) – 1984
C’est les années 1980, des groupes comme Kano illuminent les dance-floors italiens avec des titres comme Another Life. Goblin sait faire ça aussi, mais quand Goblin le fait, c’est en mesures asymétriques (en 5 temps pour être précis) absolument indansables mais Goblin s’en fout, c’est pour un film. Le thème principal de Ténèbres sera d’ailleurs samplé 25 ans plus tard par Justice (en métrique binaire cette fois) pour leur titre Phantom.

Tenebre

Reprise

6. Phenomena (Dario Argento) – 1984
Le premier grand rôle de Jennifer Connelly à 14 ans. Et une énième collaboration avec Argento pour un Goblin en roue libre qui couple une voix morriconienne à un accompagnement beaucoup plus eighties. Bizarre mais cool.

Phenomena

7. Alien Contamination (Contamination, Luigi Cozzi) – 1980
Un film d’horreur futuriste italo-allemand avec Ian McCulloch. 5,1/10 sur l’IMDb. Voilà tout ce que je sais de ce film. Mais la musique est bien.

Connexion

Withy

8. Squadra Antigangsters (Bruno Corbucci) – 1979
Jusque-là on aura pu lire que Goblin est visionnaire, que Goblin est génial, que Goblin sait tout faire. J’ajouterai ici que Goblin n’a peur de rien, composant une BO disco-ragga-WTF pour un film de gangsters humoristique, deux ans après Suspiria.

Banoon

Disco China

The Sound Of Money (feat. Asha Puthli)

9. Wampyr (Martin, Georges A. Romero) – 1976
Je n’ai pas vu ce film donc voici un pitch trouvé sur youtube (à lire en écoutant le morceau, on s’y croirait) : « Martin est un jeune homme timide et puceau qui prend son pied en buvant du sang. Résolument moderne, ce vampire n’a pas les dents longues et endort ses victimes en leur injectant de quoi dormir avant de les trancher au rasoir afin de s’abreuver. Hébergé chez un vieux cousin pro-catho fanatique qui ne cesse de l’appeler Nosferatu, le pauvre se sent incompris et explique tant bien que mal que ses gousses d’ail et autres chapelet sont inutiles. Ce que le vieux ne semble pas piger. »

Finale

10. La chiesa (Sanctuaire, Michele Soavi) – 1989
Cathédrales gothiques, groupes sataniques, chasseurs de sorcières et Asia Argento, tout un programme que ce film de 1989 musiqué en circonstance.

La chiesa

Top 10 des reprises/remixes conceptuels

Le groupe Phoenix vient de réussir à remixer Grizzly Bear et Eno sans toucher une seule machine (cf. n°1 du top), je me suis donc mis en quête de tous ces gens qui ont cherché de nouveaux concepts pour faire de leurs covers quelque chose de vraiment unique, superbe ou atroce. De l’humour, de l’imagination, du concept, de la sottise ou du génie à l’état brut, vous trouverez de tout dans ce top 10 exceptionnel, tour d’horizon de tout ce qu’un artiste est capable de faire en réutilisant le travail des autres.

1. Phoenix remixe Canon In D de Brian Eno ET Foreground de Grizzly Bear
Le concept : Trouver deux morceaux aux mêmes harmonies et laisser à l’auditeur le soin de les mixer lui-même. (lancer les deux players l’un après l’autre avec n’importe quel intervalle, ça devrait de toute façon donner quelque chose de joli)


2. Air remixe 30 millions d’amis de Jack Arel
Le concept : Partir du générique TV le plus naze du monde et en faire un tube psychédélique

3. Delpech Mode reprend Shake the Disease de Depeche Mode ET Pour un Flirt de Michel Delpech
Le concept : La musique de Depeche Mode + les paroles de Michel Delpech + un clip débile
A voir aussi : Enjoy le Loir-et-Cher, Smells like Tata Yoyo

4. Dusto McNeato reprend Take On Me de A-ha
Le concept : Prendre un clip un peu kitsch des années 80 et remplacer les paroles habituelles par une description exhaustive (et hilarante) des images.
A voir aussi : Head over Heels, China girl

5. Michel Sardou et Laurent Wolf reprennent Etre une Femme de Michel Sardou
Le concept : Reprendre un vieux titre ringard de soi-même et tenter vainement d’en faire un tube dancefloor
Le lien : ici

6. Maxence Cyrin reprend Don’t you want me de Félix
Le concept : Transcrire au piano des classiques de la musique électronique et montrer au monde entier que les artistes électro sont d’abord des musiciens de génie.
A écouter aussi : D.A.N.C.E., Around the world, Windowlicker

7. One-T plagie Ma-Hra de Modry Efekt
Le concept : Piquer une dizaine de samples dans une chanson incroyable d’un groupe tchèque inconnu et en faire un album entier.
Le titre original :

Des extraits de l’album :

8. Alain Chabat et Gérard Darmon reprennent The Carioca de Vincent Youmans
Le concept : Faire un film et danser la Carioca vers la fin sans raison particulière.

9. Aphex Twin remixe Heroes de David Bowie ET Heroes de Philip Glass
Le concept : Trouver deux morceaux qui n’ont rien à voir mais qui ont le même titre, puis en faire un savant mélange.

10. Serge Gainsbourg reprend Mon légionnaire de Edith Piaf
Le concept : Etre génial.

Top 10 des artistes réjouissants en concert ces jours-ci

Je trouve que ce blog parle vraiment trop de cinéma alors que j’aime plein d’autres trucs dans la vie. La musique par exemple. Alors voilà une liste de concerts auxquels je serai ravi d’accompagner quiconque me le proposera.

1. Rodrigo y Gabriela
Le 19 novembre au Zénith de Paris.
Non la guitare acoustique n’est plus le seul apanage de Francis Cabrel et des Gipsy Kings. Rodrigo et Gabriela sont comme des dieux de la musique descendus sur Terre pour redonner ses lettres de noblesse à la vraie bonne guitare mexicaine comme on l’aime. Et en live ça doit envoyer du sacré bois. Voici un petit morceau pour s’en convaincre.

2. General Elektriks
Le 3 mai à l’Olympia.
Il ne doit plus rester beaucoup de places (le 3 mai c’est lundi) mais le dernier album de ce monsieur, Good City For Dreamers, est à mon avis ce qu’on a entendu de plus frais sur la scène française en 2009. Un album tellement riche qu’on peut l’écouter dix fois de suite sans jamais se lasser. Et en plus le clip de son tube, Take Bake The Instant, est vachement bien branlé.

3. Alan Parsons
Le 1 juin à l’Olympia.
Ben ouais, Alan Parsons c’est quand même une star, ce qui justifie presque le tarif prohibitif des places à l’Olympia (dans les 90 euros). Après avoir collaboré à des albums mythiques (Abbey Road des Beatles, Atom Heart Mother et surtout The Dark Side of The Moon des Pink Floyd), Alan Parsons a créé avec Eric Woolfson (décédé fin 2009 hélas) The Alan Parsons Project en 1976, groupe passionnant à qui l’on doit, outre le tube Eye in the sky, des morceaux super cool comme Sirius, Lucifer, I Robot ou Mammagamma. Et voilà Alan en concert tout seul le 1er juin à Bercy. Moi je dis que ça peut le faire.


Oui d’accord, ça a un peu vieilli, mais quand même j’aime bien

4. Air
Le 1er, 3 et 4 juin à la Cité de la musique et le 6 juin salle Pleyel.
Leur dernier album a beau être moins exceptionnel que les précédents, Air reste l’un de mes groupes préférés de tous les temps de l’univers. En plus leurs premières parties sont pas dégueu (Au Revoir Simone, Hot Rats, Jarvis Cocker). Ahh la femme d’argent…

5. Aphex Twin
Le 15 mai au Centre Pompidou de Metz.
Eh oui le pape de l’électro, le taulier de Warp Records, l’homme aux 1000 pseudos, ce galopin d’Aphex Twin vient en France pour un set exclusif, mais à Metz (Moselle), pour l’inauguration de leur Centre Pompidou. Voilà…
Consolons-nous en reécoutant une de ses oeuvres les plus illustres, Windowlicker, mise en images par le vidéaste psychopathe Chris Cuningham.

Le clip de Windowlicker, un des grands traumatismes visuels de mon adolescence

6. Supertramp
Le 18 octobre 2010 à Bercy.
Supertramp a 40 ans et a calé trente-cinq dates de tournée dont six en France. L’occasion d’écouter enfin « en vrai » ces chefs-d’oeuvres que sont The Logical Song, School, Goodbye Stranger, It’s raining again, Take the long way home et tout le reste. Mais sans son ex-chanteur jésuïforme Roger Hodgson, est-ce que ce sera aussi bien ? Sinon celui-ci tourne également en solo.

7. Roxy Music
Le 2 juillet au festival de Montreux.
Brian Ferry, chanteur pop farfelu + Brian Eno, expérimentateur génial + Phil Manzanera, Andy McKay et Paul Thomson, trois musiciens pas manchots = Roxy Music. Le groupe revient pour une tournée de dix dates, sans Eno, mais avec des chansons pas piquées de hannetons. L’une des grosses affiches du festival de Montreux qui, toujours aussi bien pourvu, accueillera également cette année des gens aussi divers et intéressants que Phil Collins, Jamie Lidell, Air, Brad Mehldau, Billy Idol, Massive Attack, Paco de Lucia, Keith Jarrett ou Mark Knopfler.

8. MGMT
Les 7, 8 et 9 octobre au Bataclan.
Il paraît que MGMT en live c’est du lourd, j’y crois à mort. Même si leur dernier album Congratulations ne m’a pas (encore) transporté, les trois concerts du mois d’octobre peuvent être de grands moments.

Le clip lyncho-cronenberggien de Flash Delirium, le dernier single de MGMT

9. Stevie Wonder
Le 1er juillet à Bercy.
A voir une fois dans sa vie. Enfin je dis ça en n’ayant jamais vu…

10. Muse
Les 11 et 12 juin au Stade de France.
Quoi qu’on en dise, c’est quand même le meilleur groupe de rock des années 2000. Curieux de voir ce que peut donner leur dernier album sur scène.